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61st IFLA General Conference - Conference Proceedings - August 20-25, 1995

La numérisation des documents cartographiques : problèmes techniques et juridiques; L'expérience de la Bibliothèque nationale de France

Pierre-Yves Duchemin, Bibliothèque nationale de France, Departement des Cartes et Plans, Paris, France


ABSTRACT

La Bibliothèque Nationale de France a été créée le 3 janvier 1994. Elle regroupe la "vieille" Bibliothèque nationale créée au 14e siècle et la "jeune" Bibliothèque de France créée en 1988.
Dans le projet de la nouvelle institution, il était prévu d'offrir aux utilisateurs un grand nombre de documents numériques. Bien sûr, un grand nombre d'entre eux touch e à l'imprimé : c'est ainsi que 30 000 000 pages sont prévues pour être disponibles en Octobre 1996.
Les projets d'images numériques ne concernent pas seulement les livres, mais aussi les "collections spécialisées", c'est-à-dire dessins, gravures, photographies, musiq ue imprimée, monnaies et médailles, manuscrits... et documents cartographiques, puisque, à l'ouverture du nouveau bâtiment en février 1997, dans un premier temps, ce sont quelques 300 000 images qui seront mises à la disposition non seulement des chercheurs mais aussi d'un public plus large.
Cette communication est centrée sur les collections spécialisées, parmi lesquelles on trouve les documents les plus intéressants mais aussi les plus difficiles à ; numériser correctement. Elle se propose de présenter la politique suivie à la Bibliothèque nationale de France, ainsi que les problèmes spécifiques relatif s à la numérisation de documents spécialisés à travers les questions suivantes :


PAPER

Historique des projets de la Bibliothèque nationale de France

A l'exception du vidéodisque analogique "Révolution Française", réalisé en 1989, la première tentative de la Bibliothèque nationale pour proposer des images électroniques à ses utilisateurs remonte à 1988. Le Département des manuscrits travaillait sur un projet relatif aux manuscrits médiévaux à peinture. Comme, à cette époque, la Bibliothèque nationale n'avait pas de budget spécifique pour l'imagerie électronique, le résultat fut la publication par le Ministère de la culture d'un vidéodisque collectif, dans lequel se trouvaient des documents aussi différents que des manuscrits à peinture, un choix d'oeuvres du Mus&e acute;e du Louvre, de l'imagerie médicale, etc.

D'autres projets relatifs à des images numériques d'après les documents spécialisés de la Bibliothèque nationale furent mis à l'étude penda nt les années suivantes mais, faute de moyens financiers, aucun ne vint à son terme. Pour compenser cette absence d'une ligne spécifique dans le budget, on a essayé de tro uver des partenariats avec des compagnies privées. Plusieurs d'entre elles étaient prêtes à participer, des tests furent réalisés, des contrats prépar& eacute;s mais, en fin de compte, des problèmes juridiques empêchèrent la signature finale. La loi française est très stricte en ce qui concerne la propriét&ea cute; intellectuelle et l'usage du patrimoine national, et le Ministère de la culture, tutelle administrative de la Bibliothèque nationale, n'a pas accepté ces procédures. L'un de ces projets était sur le point de démarrer en 1991 ; il concernait la collection de 637 portulans conservés au Département des cartes et plans, en partenariat ave c une compagnie californienne.

1988 fut la création de la "Très Grande Bibliothèque", la "plus grande et plus moderne bibliothèque du monde", mais on ne sut qu'à la fin de 1990 que c'é tait la "Bibliothèque Nationale" pour les livres, les publications en série, les enregistrements sonores et les vidéogrammes. La nouvelle institution est divisée en quatre départements principaux : D1 (histoire, philosophie, sciences humaines), D2 (sciences politiques, économiques and juridiques), D3 (sciences et technologie), D4 (arts et littérat ure), auxquels s'ajoute un département spécifique consacré à l'image et au son. On se rend compte que la géographie n'est pas considérée comme un cha mp spécifique de la connaissance ; en conséquence, elle sera traitée comme une discipline transverse et les documents cartographiques seront disséminés notamment da ns les départements D1 et D4.

Très tôt, la nouvelle institution, désormais appelée "Bibliothèque de France" étudia la possibilité de proposer des images électroniques &ag rave; ses futurs utilisateurs. Comme elle avait la chance de pouvoir bénéficier de crédits spécifiques pour ces projets, il fut possible de lancer des études et de réaliser des tests : 30 000 000 pages de texte numérisé, représentant 100 000 livres d'une pagination moyenne de 300 pages, dont 60 % ont été réalis és par la Bibliothèque nationale, seront mis à la disposition des utilisateurs à l'ouverture du nouveau bâtiment. Ces textes sont numérisés en mode ima ge ou en mode texte.

La Bibliothèque de France désirait également présenter des images numériques dans les départements thématiques ; à l'exception de D2 (scien ce économiques et juridiques), dans lequel l'image ne trouve guère sa justification, des images numériques étaient envisagées pour les autres départements, n otamment pour le D1 (histoire et science humaines) et le D4 (arts and littérature).

La Bibliothèque Nationale de France, créée le 3 janvier 1994, regroupe la "vieille" Bibliothèque nationale créée au 14e siècle et la "jeune" Bibli othèque de France créée en 1988. Cette fusion fut une occasion unique de rassembler des expériences et des projets pour mettre en oeuvre une politique cohérente d'i magerie numérique : sont aujourd'hui prévues à l'ouverture du nouveau bâtiment en février 1997, les 30 000 000 pages de texte numérisé déj&agrav e; mentionnées et 300 000 images numériques, dont une part importante provient des Collections spécialisées. Des études sont en outre conduites pour définir les futurs projets qui permettront d'accroître la cohérence intellectuelle et la couverture des collections numérisées après l'ouverture.

Nature des collections spécialisées

Cette communication est centrée sur les collections spécialisées, et particulièrement sur les documents cartographiques, pour trois raisons principales :

A la Bibliothèque nationale de France, les Collections spécialisées appartiennent à la "Direction des Collections Spécialisées" qui regroupe : Cette énumération montre l'extrême variété des documents conservés à la Direction des Collections Spécialisées. Elle montre ég alement combien il est difficile d'avoir et de conserver une politique cohérente à l'intérieur de l'institution quand on doit traiter des documents aussi différents dans l e cadre d'un projet de numérisation ; elle montre enfin qu'on peut trouver à peu près n'importe où des documents cartographiques à la Bibliothèque nationale de France !

Néanmoins, chacun des départements des Collections spécialisées a étudié des projets en relation avec ses documents : 19 projets furent proposés, dont 16 ont été retenus et 11 seront mis en oeuvre avant la fin de 1996. Parmi eux, 7 sont relatifs à des documents cartographiques ou nécessitent une indexation gé ographique : photographies en noir et blanc de la Société de géographie prises en Afrique par les explorateurs français au 19e siècle, cartes de France du 17e et 18 e siècles de la collection d'Anville, dessins et gravures de villes et de paysages français du 16e au 19e siècle de la collection Destailleur, photographies en couleurs de villes et de paysages français prises au cours des années 1980 pendant les missions DATAR, photographies de Paris en noir et blanc prises par Eugène Atget, et plans d'architecture du 1 8e siècle dessinés par Boullée et Le Queu. Cette première série d'images numérisées est bien évidemment centrée sur la France, mais les nouveaux projets à l'étude possèdent un e couverture géographique nettement plus importante.

La sélection s'est effectuée selon trois critères principaux :

But de la numérisation (objectifs documentaires et / ou scientifiques)

Mettre en oeuvre une campagne de numérisation suppose que plusieurs questions importantes ont trouvé une réponse, les premières étant : pourquoi l'institution s ouhaite-t-elle proposer des images numériques à ses utilisateurs ? De quelle sorte et quelle qualité d'imagerie numérique l'institution a-t-elle besoin ? Enfin, pourquoi d épenser du temps et de l'argent pour proposer des images numériques aux utilisateurs de la bibliothèque quand ils disposent déjà de photographies et de microformes ?

Parmi d'autres finalités, les images numériques sont créées pour :

Il existe deux manières principales de répondre à ces questions : on peut considérer les documents cartographiques électroniques comme un complément d'in formation à des ouvrages imprimés, des publications en série ou, en général, n'importe quel support imprimé ou audiovisuel ; dans ce cas, le choix et la s&ea cute;lection des documents à numériser se feront dans le but de créer une unité thématique pour proposer une "collection documentaire de référence" d' images électroniques numérisées.

On peut également considérer qu'il n'est pas du tout indispensable que les projets étudiés et mis en oeuvre lors de la campagne de numérisation soient un compl& eacute;ment à un quelconque support imprimé ; dans ce cas, il n'y aura pas besoin d'effectuer une sélection de documents cartographiques dans une collection donnée : la co llection elle-même est considérée comme un ensemble et le projet doit conserver son intégrité documentaire. Ces collections montrent en général une gra nde cohérence intellectuelle et sont prévues pour avoir une existence propre, avec des buts scientifiques et / ou artistiques, en tant qu' "unités documentaires".

Les premiers projets conçus à la Bibliothèque de France étaient pensés pour être intégrés dans la politique documentaire de l'établis sement et étaient prévus pour être utilisés comme des documents complémentaires aux ouvrages imprimés présents dans les quatre départements th&e acute;matiques, où les documents cartographiques ne sont pas si nombreux.

Quand elle étudiait des projets à partir des documents de ses collections spécialisées, la Bibliothèque nationale pensait plutôt que les fonds spéc ifiques de ses collections spécialisées n'étaient pas des éléments abstraits d'information mais qu'ils avaient un sens intrinsèque.

En conclusion, les projets de la Bibliothèque Nationale de France suivent plutôt la seconde voie, à la fois pour les ouvrages imprimés et les documents des collections spécialisées ; il a été admis qu'un ensemble documentaire cohérent pouvait être à la fois utilisé comme un projet à caractère sci entifique ou artistique, et éventuellement comme complément d'information pour un ouvrage imprimé. Cette méthode permet d'éviter l'inconvénient qui consiste à offrir des ensembles thématiques incomplets : par exemple, pour montrer le rôle de la photographie dans l'histoire de l'ethnologie au cours du 19e siècle, la Biblioth&egr ave;que de France était intéressée par une sélection de 15 000 images choisies parmi les collections de photographies de la Société de Géographie, com prenant des photographies d'Afrique, d'Asie, d'Amérique du Sud, etc., quand le Département des cartes et plans proposait un fonds de 20 000 images représentant l'intégrali té des photographies de la Société de Géographie sur l'Afrique, comme un premier pas vers la numérisation complète des 200 000 photographies de la Soci&eacut e;té de Géographie.

Des images numériques pour quels utilisateurs ?

La réponse à la question consistant à savoir quelle catégorie de public est visée par un programme d'images cartographiques numériques va conditionner de façon structurante les moyens techniques à mettre en oeuvre, les taux de numérisation, les processus d'action, le budget, les postes de travail, les Opacs, etc. D'ordinaire, des enquêtes et des sondages peuvent donner une assez bonne image du public fréquentant une bibliothèque. La situation n'est pas aussi simple en ce qui concerne un établisseme nt tel que la Bibliothèque Nationale de France ; en fait, le nouveau bâtiment abritera deux bibliothèques différentes :

Il ne faut pas oublier le site Richelieu, où sont conservées toutes les collections spécialisées, où reste le Département des cartes et plans, ouvert aux chercheurs, aux étudiants... et au "grand public", car les collections importantes de documents cartographiques en France ne sont pas nombreuses.

Les différentes chaînes de travail

Dans l'ensemble, ce n'est pas un problème facile à résoudre ; une solution possible consisterait à traiter chaque problème de façon séparée , en gardant à l'esprit que l'ensemble de la collection de représentations cartographiques numériques doit être cohérent, mais on peut être effrayé du m anque de cohérence du résultat final.

Pour résoudre des problèmes différents, la meilleure solution est peut-être de mettre en oeuvre des solutions certes différentes mais intégrées dan s un processus global de traitement : chaque projet réclame une analyse propre et des tests spécifiques afin de trouver le meilleur taux de numérisation pour offrir le meilleur o util possible à l'utilisateur final.

Ces études prennent le problème à la fois d'un point de vue technique, juridique et financier ; la réponse en termes techniques est censée répondre aux b esoins des utilisateurs... et à ceux de l'établissement.

A ce stade, un nouveau problème apparaît : la numérisation doit-elle être effectuée à partir du document original ou d'un substitut photographique ? Global ement, ce n'est pas un problème technique puisque, dans la plupart des cas, il est possible de numériser un document à partir de l'original, même si les tests montrent que la numérisation d'un inversible couleur de haute qualité donne les mêmes résultats que celle d'un document de taille moyenne. Le problème est différent en ce qui concerne les documents cartographiques dont la taille ne permet pas une numérisation directe : aujourd'hui les plus grands numériseurs sont incapables de traiter un document de 2,5 x 1,5 m.

En fait, la réponse est plutôt une question de bon sens : elle dépend du document lui même. Par exemple, un projet consiste en la numérisation de 20 000 photograp hies d'Afrique de la Société de géographie. La grande majorité de ces photographies n'excède pas 9 x 13 cm ou 13 x 18 cm. Les tests ont montré qu'on obtenait un meilleur résultat si la numérisation était effectuée à partir d'un substitut photographique de bonne qualité plutôt qu'à partir du clich&eac ute; original : ces photographies anciennes sont fragiles et cassantes, certaines ont viré au brun ou au gris clair et un substitut photographique de bonne qualité permet de rehausser l e contraste et la définition du cliché lui-même.

D'autres documents soulèvent le problème inverse : quelques-uns des plans d'architecture de Boullée mesurent 4,5 x 2 m : il est bien évident qu'ils ne peuvent êt re numérisés directement et qu'on ne peut faire l'économie d'une campagne photographique.

Les experts en conservation affirment par ailleurs qu'un inversible couleur réalisé il y a 5 ans n'est plus complètement parfait et qu'un inversible couleur réalis&eac ute; il y a 20 ans peut être inutilisable, même s'il a été conservé dans un environnement protégé et favorable ; ils disent également que la dur& eacute;e de vie d'une microfiche noir et blanc peut atteindre une centaine d'années.

En France, du fait d'un contexte historique particulier, différentes solutions sont mises en oeuvre ; dans le cadre d'un plan général de conservation, appelé "plan de sauvegarde", de nombreux documents existent déjà sous forme de substituts photographiques. Selon les projets et les collections, ces substituts peuvent être très diff&eacut e;rents : microfiches, microfilms, cartes à fenêtre, microfiches monovues, inversibles couleur, inversibles noir et blanc, ektachromes de grand format (jusqu'à 24 x 30 cm), cibach romes, etc. Ces substituts photographiques, dont les plus anciens remontent à la fin des années 1970, ont été réalisés dans une optique de conservation et pas dans u ne optique de numérisation qui n'existait pas encore ; à l'époque, on pensait qu'une reproduction photographique était préférable pour l'utilisateur à un document incommunicable, et les normes de haute qualité n'ont pas toujours été une priorité : les reproductions ne sont pas des fac-similés.

Lors de la sélection des projets, la nature, la couverture et la qualité des reproductions photographiques existantes ont bien évidemment été un important crit& egrave;re de choix : il serait stupide de vouloir numériser des cartes à partir de diapositives 35 mm 24 x 36 mm ou de microfiches. Les tests ont montré que les meilleurs r&eacut e;sultats étaient obtenus à partir de cibachromes 5 pouces.

La meilleure réponse en termes techniques à la numérisation de documents cartographiques consiste à réaliser une image numérique en mode "texte" : ce pro cédé permet à l'utilisateur d' "entrer" dans l'image numérique, de sélectionner des mots, d'effectuer un zoom sur un détail géographique ou toponymiq ue et de sauvegarder le résultat de sa recherche sur une disquette ou un DOC s'il le désire. Cette façon de faire, si elle garantit une grande qualité, coûte beaucou p plus cher et nécessite des moyens techniques plus importants : les taux de numérisation requis pour les projets de la Direction des collections spécialisées couvrent un éventail allant, par exemple, de 1 000 x 1 500 dpi ou 1 500 x 2 000 dpi pour les photographies noir et blanc 20 x 30 cm d'Atget à 2 000 x 3 000 dpi pour les photographies en couleur 50 x 60 cm de la DATAR et 4 000 x 6 000 dpi pour les cartes de France. Quelques cas particulièrement difficiles nécessitent un taux de résolution atteignant 6 000 x 8 000 dpi (Rappe lons pour mémoire qu'un page de texte est généralement numérisée au taux de 400 dpi). Le résultat et parfaitement lisible sur un écran SVGA 17", perme t une bonne qualité de reproduction ainsi que la publication de catalogues illustrés d'imagerie cartographique et devient absolument parfait sur un écran graphique 21". Si la con sultation d'une image numérique sur un écran graphique ne pose aucun problème et permet la lecture des toponymes sur une carte, le problème est la taille gigantesque des f ichiers à traiter : une carte ancienne, c'est-à-dire un document pas très détaillé, peut atteindre 200 Mo..., même si la compression permet de le rédui re à environ 200 Ko.

Normes actuelles

Le contrôle de la qualité est un opération très importante de la chaîne de travail et l'utilisation de normes, à la fois pour la numérisation, l'ex ploitation et la communication permet d'obtenir de bons résultats. Malheureusement, de réelles normes reconnues à l'échelle mondiale n'existent pas encore. Parmi les différents procédés techniques aujourd'hui disponibles , le procédé Kodak existe, mais s'il est devenu une sorte de norme de facto, ce n'est pas encore une véritable norme officielle internationale. La Bibliothèque nationale d e France utilise pourtant le photo CD Kodak, en partenariat avec le Laboratoire de micro-image implanté près de Paris, dont sont issus tous les exemples présentés.

Par exemple, la compagnie Kodak fournit des disques contenant une centaine d'images électroniques à deux taux de résolution différents : 512 x 768 dpi pour le contr&oc irc;le de l'image et le "butinage" et 1024 x 1 536 dpi pour la consultation. Si le substitut photographique est de qualité et si le besoin s'en fait sentir, il est possible d'augmenter la fine sse de résolution jusqu'à 4 000 x 6 000 dpi. D'autres compagnies fournissent des cassettes DAT contenant 500 à 700 images électroniques aux même taux de résol ution.

Tout au long de la chaîne de travail, on doit également se préoccuper des différentes sortes de support physique : depuis le support d'enregistrement, le support de tra nsfert, le support servant à la fourniture du document numérique, le support de stockage pour la consultation jusqu'à, enfin, le support final utilisé pour la conservation des images numériques, on peut rencontrer aussi bien des bandes magnétiques que des disques optiques compacts, en passant par des disques durs ou des WORM.

Le support d'exploitation, c'est-à-dire le serveur, n'est pas le support utilisé pour la consultation, car la qualité de l'image numérique dépend du maté riel utilisé. Une résolution de 1 000 x 1 500 dpi sur un écran TV "haute définition" est suffisante si le document original n'est pas très grand et pas trop d&eacut e;taillé. Dans certains cas, afin d'éviter toute piraterie intellectuelle, le support de consultation pourra présenter une qualité dégradée : un document de travail ne requiert pas la même qualité qu'un document prévu pour publication. Une imprimante à sublimation de trop haute qualité peut parfois s'avérer danger euse...

Le dernier point, mais non le moindre, qu'il faut prendre en compte et toujours garder à l'esprit est que les données seront toujours plus importantes que les supports physiques : l e support peut évoluer, mais les données restent, notamment si elles possèdent une structure normalisée et sont conservées dans un environnement favorable.

Problèmes de catalogage et d'indexation

Il serait inutile d'essayer de proposer des images numériques de documents cartographiques sans catalogage associé. Dans ce cas, l'utilisateur préférerait sans doute f euilleter plus ou moins au hasard dans des albums photographiques plutôt que d'essayer de retrouver un document sur un disque optique compact ou dans une base de données sans aucune inde xation.

Doit-on cataloguer les images numériques à l'unité ou bien par lots ? Notre réponse est sans ambiguïté : tous les documents doivent être catalogu&eac ute;s à la pièce.

Cela semble évidemment une solution idéale que de cataloguer chaque document comme une unité documentaire séparée et de créer des liens entre eux afin d' obtenir un ensemble "virtuel" dans la base de données, mais cette solution peut s'avérer longue et coûteuse. Si les documents originaux ont déjà été ca talogués à l'unité dans la base de données, le problème sera infiniment plus simple : il suffira, dans ce cas, d'ajouter une adresse logique aux descriptions biblio graphiques et de créer un lien réciproque afin d'obtenir aussi bien l'image numérique à partir de la notice de description bibliographique dans la base de données q ue la description textuelle à partir de l'image. Le résultat sera encore meilleur si le système est capable de gérer un catalogage à niveaux : il sera alors possibl e de lier précisément une ou plusieurs images numériques à une notice textuelle contenue dans un ensemble plus important Si le besoin s'en fait sentir, et si les cr&eacut e;dits et les ressources humaines sont disponibles, la conversion rétrospective d'un fichier ou d'un catalogue imprimé, par numérisation et reconnaissance optique de caract&egrav e;res ou par saisie "classique", pourra être une solution élégante pour obtenir un catalogage à la pièce.

On peut également procéder autrement si les documents originaux n'ont pas encore été catalogués, mais seulement inventoriés ; le choix dépendra du personnel disponible. Dans certains cas, le choix d'un catalogage par lots pourra s'avérer une solution suffisante si chaque document est au moins identifié par une courte légen de et une adresse logique dans la base de données. Dans ce cas, l'utilisateur effectuera sa recherche dans la base de données, trouvera une description contenant plusieurs images num&ea cute;riques et devra les faire défiler pour trouver celle qu'il souhaite.

Quelle sorte de catalogage doit-on effectuer pour obtenir le meilleur résultat ? Faut-il encore respecter les ISBD, les formats MARC et les listes raisonnées d'indexation mati&egrav e;res quand l'hypertexte et le "langage naturel" font leur apparition ? En France, nous répondons fermement par l'affirmative ! Nous pensons en effet que les formats MARC et RAMEAU, version fr ançaise de LCSH, sont encore des normes internationales pour longtemps, même à travers une structure SGML.

Dans la mesure où la future base de données (appelée "Système d'information") n'est pas encore opérationnelle, tous les documents spécialisés sont catalogués dans le base de données BN-OPALINE. Le nouveau Syst Système d'information sera développé autour du système ouvert UNIX, possèdera des inte rfaces W-Window, des liens de transmission à grande vitesse FDDI et des liens TCP/IP ETHERNET au protocole ISO Z 3950.

Coût de la numérisation

Les problèmes de coût sont une question sérieuse : le coût total d'une campagne de numérisation peut être très élevé, tout particuli&eg rave;rement si l'on a choisi des taux de résolution très importants, même si la numérisation aujourd'hui coûte deux fois moins cher qu'il y a deux ans. Pourtant, le c oût de la numérisation d'une image est deux fois moins élevé que le coût d'un substitut photographique sur microfiche, mais l'on doit garder à l'esprit que le coût de la numérisation ne comprend pas la seule numérisation proprement dite, mais couvre également les éventuels coûts de restauration, les éventuell es campagnes photographiques, le catalogage, l'indexation, les différents supports physiques, les éventuels postes de travail spécifiques munies d'écrans graphiques "haute définition", etc.

Problèmes juridiques

En France, la situation juridique sur l'utilisation des images numériques n'est pas simple : les lois de propriété et de protection intellectuelle sont très strictes e t on doit toujours rechercher d'éventuels ayant-droits. Aujourd'hui, parce qu'ils n'ont aucun contrôle sur l'usage des images numériques disponibles, les ayant-droits semblent bea ucoup plus inquiets qu'il y a dix ou vingt ans : ils semblent considérer l'INTERNET et les autres réseaux comme des machines diaboliques destinées à les gruger... quand i ls acceptaient, il y a plusieurs années, sans sérieuses discussions, la reproduction des documents dont ils détiennent les droits par des moyens photographiques, magnétiqu es ou analogiques.

C'est la raison pour laquelle la majorité des projets en cours concerne des documents anciens, pour lesquels n'existent pas de problèmes de communication ou de reproduction, puisqu' ils appartiennent à la Bibliothèque nationale de France depuis des années, voire des siècles. La période officielle de 50 ans empêche ainsi l'établisse ment d'utiliser des documents qui ne sont pas encore tombés dans le domaine public.

Toutefois, quelques institutions, telles que, par exemple, Spotimage, sont en pourparlers avec la Bibliothèque nationale de France au sujet de la conservation de leurs archives élec troniques avec, en compensation, une possible utilisation de leurs documents.

Dans l'ensemble, en ce qui concerne les documents de moins de 50 ans, la solution consiste souvent en la signature d'une convention spécifique entre la Bibliothèque nationale de Fra nce, voire le Ministère de la culture et les ayant-droits.

Les réseaux

Le développement récent des "autoroutes de l'information", telles que l'INTERNET soulève de nouveaux problèmes : les accès et communications à longue dis tance ne sont pas faciles à gérer d'un point de vue technique, pratique et juridique.

Un des problèmes les plus simples à résoudre est le problème technique : le réseau lui-même doit s'appuyer sur une base physique solide. En France, la sol ution est bien évidemment le réseau RENATER, réseau universitaire conçu et réalisé pour permettre aux bibliothèques universitaires et de recherche de travailler en réseau.

D'un point de vue pratique, l'établissement se doit de définir clairement ses besoins ; par exemple :

D'un point de vue juridique, il est souvent impossible de contrôler l'usage qui est fait des images numériques disponibles sur le réseau et, une fois encore, des problè mes apparaissent avec les ayant-droits. Dans certains cas, par exemple avec les réseaux fermés, il est possible d'identifier l'utilisateur distant et de savoir ce qu'il fait. Dans la plupart des cas, avec les réseaux ouverts tels que l'INTERNET, cette identification n'est pas possible : tout au plus peut-on savoir que M. Untel s'est connecté à la base de données, mais il est impossible de savoir ce qu'il a fait... et ce qu'il va faire du résultat de sa recherche.

Néanmoins, la Bibliothèque nationale de France s'est récemment ouverte à l'INTERNET, et offre sa base de données BN-OPALINE sur le réseau depuis juin 199 5, grâce à des protocoles Telnet et Z 3950.

La page d'accueil de la Bibliothèque nationale de France sur l'INTERNET consiste en une base de données graphiques spécifique intitulée "1 000 enluminures sur INTERNET " ; cette base de données devrait être prête en septembre 1995 pour l'inauguration de l'exposition "Culture et pouvoir" à la Bibliothèque du congrès, dans laqu elle on trouvera de nombreux objets provenant de France. Ce projet sera l'une des plus importantes bases de données graphiques sur l'INTERNET. Sept manuscrits à peinture du 14e si&egrav e;cle, la période de Charles V, le fondateur de la Bibliothèque nationale, ont été numérisés ; parmi eux, l' "Atlas catalan" par Abraham Cresques, daté ; de 1381, représente l'état du monde connu à cette époque et constitue le chef-d'oeuvre de ce projet. Ce portulan comporte 6 feuilles de vélin, pliées en le ur milieu et montées sur des ais de bois, chaque feuille mesurant 64 x 49 cm. L'original a été photographié sur des cibachromes 4 x 5 pouces et numérisé au t aux de 2 000 x 3 000 dpi pour les feuilles entières et au taux de 4 000 x 6 000 dpi pour les détails ; plus de 50 détails sont disponibles. Une version spécifique de cette base graphique sera opérationnelle sur une borne interactive à écran tactile pendant l'exposition de Washington ainsi qu'à la Bibliothèque nationale de France.

Telles sont, dans l'ensemble, les questions auxquelles la Bibliothèque nationale de France doit répondre. Le nouveau bâtiment de Tolbiac devrait accueillir le public en f&eacu te;vrier 1997, c'est-à-dire qu'il ne reste que 18 mois pour résoudre tous les problèmes, accomplir toutes les tâches indispensables, numériser tous les documents...