IFLA

As of 22 April 2009 this website is 'frozen' in time — see the current IFLA websites

This old website and all of its content will stay on as archive – http://archive.ifla.org

IFLANET home - International Federation of Library Associations and InstitutionsAnnual ConferenceSearchContacts
*    
To Bangkok Conference programme

65th IFLA Council and General
Conference

Bangkok, Thailand,
August 20 - August 28, 1999


Code Number: 030-150-F
Division Number: II
Professional Group: Social Sciences Libraries
Joint Meeting with: -
Meeting Number: 150
Simultaneous Interpretation:   Yes

L'information en sciences sociales, le parent pauvre

Maurice B. Line
Information and Library Consultant
Harrogate, UK
E-mail: mbl@hgte.demon.co.uk


Abstract

De nombreux traits caractéristiques rendent les sciences sociales moins accessibles au contrôle bibliographique que les sciences généralistes. Cela est dû à : l'instabilité inhérente des sujets et des thèmes, à l'absence d'une terminologie commune aux différents pays concernés, à l'existence de biais politiques et nationaux, à la faiblesse des amendes pour photocopillage. Une autre raison est le manque apparent d'intérêt des chercheurs en sciences sociales quant à l'amélioration des services d'information. Des recherches menées il y a plus de vingt cinq ans ont mis en lumière les besoins et les usages des chercheurs et indiqué quelques solutions afin d'améliorer la situation, sans résultats. Dans un monde de l'information radicalement modifié par Internet, nous mesurons toute l'importance de diriger de nouvelles études sur les usages et les besoins en matière d'information.


Paper

Il y a 30 ans, j'ai été l'instigateur des projets de recherche sur les besoins et les services en sciences sociales. INFROSS, la première étude, visait à découvrir comment les chercheurs en sciences sociales généralistes cherchaient l'information. Une des raisons que je fournissais lorsque j'étais à la recherche de subventions était la suivante : presque toutes les études antérieures menées sur les besoins et les usages en information portaient sur les sciences naturelles et j'ai considéré qu'il y avait un risque à ce que les solutions adoptées pour les sciences soient appliquées aux sciences sociales, sans prendre en compte les nombreuses différences entre ces deux grands domaines. Voici, en résumé, les caractéristiques spécifiques des sciences sociales :

Qu'est-ce-qui rend les sciences sociales différentes?

Aucun consensus n'a été atteint par rapport aux éléments constitutifs des sciences sociales en dehors de la sociologie, des sciences politiques et de l'économie. La majeure partie de ces éléments constitutifs comprendrait l'anthropologie sociale, la psychologie et la gestion, d'autres l'éducation ou encore l'histoire. Un fil directeur cependant : la discipline s'intéresse aux individus en interaction ou agissant en groupes. L'interaction des individus ayant un comportement prévisible et "les imprévisibles" sont des facteurs d'instabilité et d'incertitude. La plupart des sciences sociales sont assez jeunes et à peines organisées comme le sont d'autres disciplines plus cohérentes.

Les sciences sociales comprennent un champ très vaste de disciplines diverses. L'économie est une des plus récentes : classée comme une discipline annexe à l'économie, l'économétrie constitue pratiquement une branche des mathématiques et peut par conséquent être considérée comme une science "fondamentale" (il faut cependant préciser que la plus grande partie des données s'inscrivant dans des modèles économétriques sont très "flexibles" : la superstructure peut être minutieusement construite, mais l'infrastructure perd souvent du terrain). Certaines sciences sociales sont flexibles de bout en bout : la probabilité selon laquelle deux enquêtes sociales menées sur le même sujet dans la même zone géographique à un intervalle de quelques mois seraient concordantes n'est pas élevée. Il suffit de regarder les sondages en politique.

Il s'ensuit que les concepts et la terminologie ne sont pas universels ou concordants au fil du temps. Il existe un consensus à l'intérieur de certaines régions et dans des cultures et systèmes politiques semblables, mais malgré cela, il existe aussi une tendance "nationaliste". Par conséquent, la maîtrise du sujet et l'accès à l'information sont plus difficiles qu'en sciences tout court ; les "humanités" sont plus facilement controlables. De plus, contrairement aux sciences, la majorité des chercheurs en sciences sociales écrivent dans leur langue maternelle (certains iront jusqu'à dire dans leur propre jargon). Il n'y a donc pas de fait de langage commun. Ces facteurs concourent à la difficulté d'élaborer des services d'information satisfaisants au plan international.

Dûe au manque relatif de cohérence et de concordance dans ce domaine et à l'instabilité du sujet, la référence à des travaux antérieurs en sciences sociales est moins fréquente que dans les sciences pures ou appliquées. Et malgré les échanges (visibles ou non) entre chercheurs en sciences sociales, ils ne parlent pas d'une seule voix. Les scientifiques peuvent énoncer clairement leurs idées de manière universelle (et ils le font) sur les services d'information ou sur d'autres sujets - en témoignent les nombreux congrès qui se sont tenus sur les besoins d'information en matière scientifique. Le résultat est que les chercheurs en sciences sociales en tant que "corps constitué" ne semblent pas véritablement concernés par l'information ou ses lacunes, par plus qu'ils ne sont structurés pour agir ou parler sur ce sujet.

Dans tous les cas de figure, le marché de l'information est un marché restreint. Le marché mondial est développé, mais pour les raisons déjà énoncées, les services internationaux en matière d'information doivent être complétés, quand ils existent, par les services nationaux. Assez peu proposent des résumés et une indexation scientifiques : un chercheur en sciences sociales doit alors, afin d'avoir une bonne couverture d'un sujet, croiser plusieurs sources. Peu d'entre eux y recourent car cela représente trop d'obstacles ou parce qu'ils estiment qu'un oubli n'est pas très important.

INFROSS collecte un grand nombre d'informations sur les besoins et les usages des chercheurs en sciences sociales en Grande-Bretagne, ainsi que sur d'autres catégories. Un deuxième projet de recherche vient compléter INFROSS : DISISS - mesure des systèmes d'information en sciences sociales. Le projet reposait sur l'analyse bibliométrique de citations, avant que l'analyse automatique de données informatisées fut possible. Deux caractéristiques ont été dégagées, ces dernières relativement uniques et donc rares : les citations provenaient d'ouvrages et de périodiques, mais également de périodiques d'un rang très moyen ou très élevé. A la lecture des résultats, il est surprenant de constater que les conclusions de ces études puissent se limiter aux périodiques, quand on sait l'importance que la sociologie a sur d'autres disciplines par exemple. Il convient donc de souligner l'importance des services d'information.

Que faire?

DISISS devait offrir des solutions aux problèmes que pose l'information aux chercheurs en sciences sociales. D'autres études viennent compléter la réflexion. L'une d'elles étudiait l'accroissement de la littérature en sciences sociales, avec un éclairage surprenant. Une autre examinait la couverture de deux domaines. Une troisième évaluait l'information produite par deux services sur la sécurité sociale. Cependant, le plus intéressant concernant cet article était une expérience pratique visant à optimiser des outils d'indexation et de synthèse, cherchant à trouver le meilleur équilibre entre la fréquence des numéros et leur taille. Aucun travail similaire n'a été accompli depuis lors. Certaines conclusions intéressantes et potentiellement utiles ont été obtenues.

Parallèlement à INFROSS et DISISS, une autre étude a vu le jour et a été entreprise sur trois années : un service d'information expérimental dans les sciences sociales, à l'attention des scientifiques et des enseignants des facultés de Bristol et de Bath. Il fut démontré qu'un service d'information personnalisé offert par deux spécialistes eux-mêmes chercheurs était grandement apprécié (malgré un certain cynisme au départ) : la circulation de l'information permit d'obtenir de bien meilleurs résultats.

Qu'est-ce-qui en a finalement résulté?

Le résultat de ces recherches n'a rien apporté, hormis le fait qu'elles furent citées pendant longtemps - trop longtemps car elles se trouvèrent pérmées avec le changement important que subit l'information à l'heure actuelle. Les citations étaient faites par des universitaires, mais, comme il a été dit précédemment, la recherche avait été conçue comme une base pour l'action, surtout par des producteurs d'outils secondaires. Malheureusement, il s'avéra impossible de les intéresser. Ils faisaient preuve de trop d'amateurisme, rendant des services médiocres ne couvrant pas leurs coûts, ou bien ils représentaient des éditeurs importants qui n'étaient pas intéressés par le changement aussi longtemps qu'ils faisaient des profit ; personne ne se souçiait d'apporter aux utilisateurs de meilleurs services. La seule possibilité de changement pouvait survenir si de nouveaux et meilleurs services déchargeaient les services existants de leurs activités, mais le domaine n'était pas suffisamment lucratif pour générer beaucoup de compétition.

Les arguments développés plus tôt dans mon article sur les sciences sociales sont encore valides à mon sens. Toutefois, mes craintes sur le fait que les services d'information en sciences sociales allaient suivre aveuglément ceux en sciences n'étaient pas fondées ; si cela vait été le cas, ils auraient été bien plus performants qu'ils le ne le sont actuellement.

Quelle démarche adopter?

Les efforts antérieurs visant à améliorer les services ayant échoué, que peut-on faire à présent ? On peut distinguer trois étapes : la première consiste à réaliser un nouveau diagnostic. Le monde de l'information a changé radicalement depuis INFROSS et DISISS. Internet offre beaucoup de possibilités de recherche si l'on peut y consacrer du temps. Certains éléments peuvent cependant être trouvés avec moins d'efforts qu'auparavant : l'accès direct à des corpus de données y compris des recueils de statistiques, des enquêtes sociales en sont des exemples. Dans quelle mesure, l'accès à cette masse d'information peu contrôlée peut compenser ou compléter la variété inadéquate de services déjà structurés ? Cela ajoute-t-il à la confusion ? Apprécié ou pas, Internet existe : comment connaître l'usage qui en est fait par les chercheurs en sciences sociales ? Leurs habitudes sont-elles modifiées ? Si oui comment ? Cela fait une trentaine d'années qu'INFROSS avait donné les premiers résultats en la matière. Les usages ne sont pas difficiles à connaitre, mais il en est autrement des besoins. Avec INFROSS, nous avions essayé de savoir les types de recherche mises en place, mais cela nous a amené trop loin. J'aimerais favoriser à présent l'utilisation de méthodologies plus souples telle que le "Focus Group" complétée par la méthode des questionnaires qui me semblent primordiaux afin d'obtenir un échantillon représentatif. Il faudrait que l'étude se déroule sur plusieurs pays, faisant appel aux mêmes méthodes pour rendre la comparaison possible. Les études bibliométriques seraient d'un grand profit car elles renseignent sur les relations interdisciplinaires, et elles sont plus facilement réalisables qu'il y a trente ans.

Une aide en matière de recherche d'information pour les chercheurs en sciences sociales doit être approfondie, notamment en concevant des services d'information avec l'accès à Internet.

Ce n'est pas la première fois qu'un appel est lancé pour de nouvelles études sur les besoins et les services d'information en sciences sociales. Le manque de moyens humains et financiers n'est pas la seule cause d'insuccès en la matière. Il faut cependant s'assurer que l'information en sciences sociales ne soit plus le parent pauvre des sciences et techniques.

Références

Design of Information Systems in the Social Sciences. Towards the improvement of social science information systems: overview of research carried out 1971-1975. Bath: Bath University Library, February 1980. (DISISS Research Reports, series A no.1.)

Evans, S.M. & Line, M.B. A personalized service to social science researchers: the Experimental Information Service in the Social Sciences at the University of Bath. Journal of Librarianship, 5(3), July 1973, 214-232.

Hicks, D. The difficulty of achieving full coverage of international social science literature and the bibliometric consequences. Scientometrics, 44(2), February 100, 193-215.

Line, M.B. Designing secondary services in the social sciences: reflections on a research project. Inspel, 15(2), 1981, 85-95.

Line, M.B. The influence of sources used on the results of citation analyses. Journal of Documentation, 35(4), December 1979, 265-284.

Line, M.B. Information requirements in the social sciences: some preliminary considerations. Journal of Librarianship, 1(1), January 1969, 1-19.

Line, M.B. The information uses and needs of social scientists: an overview of INFROSS. Aslib Proceedings, 23(8), August 1971, 412-434.

Line, M.B. Secondary services in the social sciences: the need for improvement and the role of libraries. Behavioral and Social Sciences Librarian, 1(4), Summer 1980, 263-273.

Line, M.B. The structure of social science literature as shown by a large-scale citation analysis. Social Science Information Studies, 1(2), January 1981, 67-87.

Line, M.B. & Roberts, S. The size, growth and composition of social science literature. International Social Science Journal, 28(1), 1976, 122-15

*    

Latest Revision: July 15, 1999 Copyright © 1995-2000
International Federation of Library Associations and Institutions
www.ifla.org