IFLA

As of 22 April 2009 this website is 'frozen' in time — see the current IFLA websites

This old website and all of its content will stay on as archive – http://archive.ifla.org

IFLANET home - International Federation of Library Associations and InstitutionsAnnual ConferenceSearchContacts

 
To Bangkok Conference main page

65th IFLA Council and General
Conference

 

Bangkok, Thailand, August 20 - August 28, 1999

Collecting and preserving the French oral heritage : the role of a national library (version française)

Joëlle Garcia
Secretary, IFLA Section on Audiovisual and Multimedia
« Bibliothèque nationale de France», Audiovisual Department

Abstract:

Dans une culture nationale d'inspiration étatique, centralisatrice et fondée sur l'écrit, le folklore oral a été longtemps marginalisé. Lorsque les arts et traditions populaires ont été intégrés aux études folkloriques puis à une ethnologie de la France, le patrimoine oral a accédé à une reconnaissance qui en fait un objet d'étude à part entière. Les espaces locaux sont devenus des lieux et les objets d'une production de savoirs, d'histoire et de traditions spécifiques, qui ont construit cet espace en réceptacle du patrimoine. Balbutiante au 18e siècle, l'étude du matériau oral se constitue en discipline scientifique au 19e siècle et, grâce à la possibilité de capturer la voix humaine au moyen de l'enregistrement sonore, développe des sources sonores aux côtés des enquêtes écrites. Voyons comment sont préservées, en France, les traditions orales enregistrées au travers des institutions qui conservent des sources sonores et quel peut être le rôle d'une bibliothèque nationale dans ce contexte.

Paper:

1. Les organismes chargés de collecter, de conserver ou de promouvoir le patrimoine oral français

1.1. Les démarches institutionnelles

C'est à la fin des années 30 que naissent des démarches institutionnelles. L'idée de créer un musée du folklore français existait depuis la fin du 19e siècle. L'étude d'une ethnologie des peuples étrangers s'était constituée après la mission Dakar-Djibouti entre 1931 et 1933. Pour ce qui est de l'ethnologie française, l'élément déclencheur est le premier Congrès international de Folklore, tenu à Paris en 1937. Le musée des Arts et traditions populaires a été créé en 1937 à partir des collections françaises du musée ethnographique du Trocadéro ; les collections étrangères étant versées au Musée de l'Homme. La naissance de ce musée traduit la reconnaissance et l'institutionnalisation d'une ethnologie de la France. Une chaire de folklore est créée en 1942 à l'Ecole du Louvre, un laboratoire de recherche est associé au musée à partir de 1945, qui devient en 1966, par convention avec le CNRS, le Centre d'ethnologie française. Le musée est doté d'une phonothèque qui conserve des documents sonores enregistrés inédits : entretiens, informations ethnographiques collectées sur le terrain, littérature orale (contes et récits), musique vocale et instrumentale ainsi que des collections discographiques, des émissions radiophoniques et le fonds du Musée de la Chanson.

L'oralité est exploité comme un matériau pour l'ethnologie, la linguistique et l'histoire orale. Des centres de recherches se développent au sein d'Université ou de grandes écoles (Ecole pratique des Hautes Etudes, Ecole des Hautes Etudes en Sciences sociales, etc.), comme, par exemple, le centre de recherches méditerranéennes sur les ethnotextes, l'histoire orale et les parlers régionaux (CREHOP) rattaché à l'Université de Provence. Dans le domaine sociolinguistique et musical. Le CNRS joue un grand rôle avec ses unités de recherches et ses programmes à caractère linguistique ou ethnologique. Par exemple, le C.N.R.S., reprenant les entreprises de l'Atlas linguistique de la France paru entre 1902 et 1910, a créé un groupe de recherches coordonnées sur les atlas linguistiques et les cultures et parlers régionaux de France (GRECO) en 1977. Des atlas sont depuis publiés, recueils de matériaux bruts destinés à inventorier un patrimoine en recueillant des parlers en voie de disparition ou sérieusement menacés par l'évolution générale. Les enquêteurs font appel à la pratique mais aussi à la mémoire de leurs interlocuteurs pour saisir l'épaisseur historique du langage. Le programme Ethnotextes, découle des activités du GRECO des Atlas. Des séries de monographies présentent une étude du discours oral spatialisé, envisagé dans sa cohérence interne de discours, dans son contexte de communication et sa signification culturelle

Au sein du ministère de la Culture, la mission du Patrimoine ethnologique a été fondée en 1980. Dès leur mise en place, la mission du Patrimoine ethnologique et le Conseil du Patrimoine ethnologique ont proposé et mené une politique dans quatre directions : recherche, formation, publication et valorisation. Les actions de la Mission s'étendent de plus en plus aux préoccupations nouvelles issues du milieu environnant : étude de la ville et de sa périphérie, recherche d'actions en commun avec l'Europe de l'Est, intérêt particulier pour des patrimoines menacés ou mal pris en compte comme le patrimoine rural. La Mission joue aujourd'hui un rôle fédérateur et incitatif. Elle finance des équipes de chercheurs, dispense des allocations de recherche, organise des stages, et publie des monographies thématiques ainsi que la revue Terrain qui aborde toutes les facettes de la société française - et, plus largement, de la société européenne - d'aujourd'hui.

La France a fait de la promotion du plurilinguisme, c'est-à-dire de la reconnaissance de la diversité linguistique et l'ouverture aux autres dans le respect de leur langue et de leur culture, un de ses axes culturels. Une délégation générale à la langue française consistant à faire le point sur la politique menée en faveur des langues régionales, et d'émettre des propositions sur l'évolution du dispositif a été créée. Elle conclut notamment que la place faite aux langues régionales doit illustrer, accompagner et soutenir les grands choix dans lesquels le pays s'est engagé ou a commencé à le faire : l'Europe, la décentralisation, la francophonie, le multilinguisme. En 1999, sera signée la Charte européenne des langues régionales et minoritaires. p> Si l'importance de la tradition orale pour la linguistique ou l'ethnologie a été comprise très tôt, ce n'est que récemment que le témoignage oral a pris une valeur historique. A partir des années 1980, les centres d'archives, Archives nationales, les archives départementales ou militaires (SHAT, marine), qui recevaient déjà des fonds sonores depuis les années 1960, ont entrepris de développer leurs archives sonores en utilisant le témoignage oral dans un but historique.

1.2. La force du mouvement associatif

En parallèle à ces démarches institutionnelles, des initiatives privées se sont constituées en mouvements associatifs. Depuis les années 1975, se crée un réseau de plus en plus dense de musées qui mettent en valeur les identités culturelles régionales et traduisent la réappropriation d'un patrimoine culturel que la seconde révolution industrielle révoque de plus en plus dans le passé. Les associations ayant pour objectif d'assurer la mémoire d'un terroir, d'une langue, d'un métier, d'un savoir-faire ou d'un objet du quotidien ont également constitué des fonds sonores.

Une Fédération des Associations de Musiques et Danses Traditionnelles est née en 1985 du regroupement des Associations qui participaient depuis 1982 à la Commission consultative sur les Musiques Traditionnelles créée par la Direction de la Musique et de la Danse, au Ministère de la Culture. Elle a pour objectifs de "promouvoir, coordonner et diffuser, les actions de recherche, expression, création, formation et éducation permanente ou populaire, menées dans le domaine des musiques et danses traditionnelles, représenter, à leur demande, les associations membres auprès des pouvoirs publics et de l'opinion ". Elle a organisé en novembre 1989, des Assises nationales qui ont rassemblé près de 300 participants et permis de jeter les bases de la structuration du travail actuel, réparti en commissions (recherche, documentation, formation, éditions sonores et écrites, diffusion, danse, musiciens professionnels, musiques issues de l'immigration). Elle met en réseau des chercheurs et organise des ateliers-recherche en ethnomusicologie, elle est active dans le domaine de la formation initiale et continue ; elle travaille à l'harmonisation des systèmes de description des archives et documents, et publie des guides à l'usage de tous les Centres de documentation (institutionnels ou associatifs). Elle mène une politique de publication, rassemblant des articles autour de sujets thématiques ou instrumentaux (Collecter ; Les cornemuses ; L'air du temps ; L'homme, l'animal et la musique ; Vielle à roue ; L'homme, le végétal et la musique ; Accordéon diatonique). Elle se réclame d'un patrimoine en mouvement, dont nous sommes à la fois utilisateurs et fabricants. La FAMDT entend embrasser de manière équilibrée les deux versants des musiques traditionnelles : l'un que l'on pourrait appeler localiste, affirmant l'appartenance de ces musiques à une tradition culturelle (qui fonde leur spécificité), et inscrivant leur développement dans celui de leur contexte culturel ; l'autre, que l'on pourrait dire "universaliste", insistant sur la plasticité de ces musiques, rappelant que toute expression artistique dépasse le cadre du contexte qui l'a vu naître.

Elle regroupe de grandes associations régionales comme Dastum (Bretagne), Métive (Poitou-Charentes), le Conservatoire occitan (Toulouse), etc.

Le Conservatoire occitan, créé en 1970, est un lieu de ressources consacré à la culture de tradition orale, et plus particulièrement à la musique, à la danse et au chant traditionnel. Il met à la disposition du public une bibliothèque, une photothèque et une phonothèque de documents sonores mais aussi audiovisuels, inédits mais aussi édités. Il travaille à l'enrichissement de ses collections d'inédits par ses propres actions de recherche et est parfois saisi de proposition de dépôts de fonds par des collecteurs et des chercheurs.

Le réseau associatif régional Métive, culture et langue poitevines-saintongeaise, couvre l'ensemble de Poitou-Charente et de la Vendée depuis 1972. Il dispose d'une structure regroupant musée municipal, salle de spectacle, studios son et audiovisuel, lieux d'exposition, de formation, de congrès et un Centre de Recherche et de Documentation sur l'Oralité : la Maison des Cultures de Pays. Il a fait réaliser des collectes des témoignages des générations antérieures sur toutes les composantes de la culture régionale : langue, musique et danse, chants et arts de la parole, savoir-faire, etc. Le CERDO conserve des fonds inédits, sonores et vidéos, de la région Poitou-Charentes et Vendée, ainsi que des fonds d'importance moindre, concernant la Loire-Atlantique, l'Anjou, la Mayenne, la Bretagne, le Québec, l'Italie, l'Afrique du Nord. Il conserve également des fonds d'archives de la Société de Mythologie françaises et de manuscrits et imprimés divers. Cette association a en projet la réalisation d'un site Internet.

L'association Dastum, créée en 1972 et qui s'est développée grâce à un réseau de bénévoles, d'équipes locales et d'associations partenaires, s'est donné pour mission de collecter, diffuser et mettre en valeur le patrimoine ethnologique de Bretagne, avec un accent particulier placé sur les traditions orales et la musique traditionnelle. Ses activités de recherche couvre l'ensemble de la Bretagne « historique » incluant la Loire-Atlantique et les communautés bretonnes hors de ce territoire tel qu'il est défini. Les documents, collectés par des individus ou des associations sont accessibles à la médiathèque centrale de l'association. Un recensement discographique des collections éditées a été effectué et certains enregistrements sont disponibles à l'association grâce à des dons. Un projet de numérisation pour diffusion sur Internet a été monté en relation avec le département d'ethnomusicologie du Musée de l'Homme , la phonothèque du Musée des Arts et Traditions populaires et la FAMDT.

2. Le rôle d'une bibliothèque nationale de France

2.1. Un passé propice

C'est le désir de «rendre la parole humaine éternisée» qui, en 1911, incite le linguiste Ferdinand Brunot à créer dans son laboratoire de la Sorbonne des «Archives de la Parole». L'industriel Émile Pathé est de l'aventure. Il s'agit de constituer pour la première fois en France un patrimoine sonore destiné à l'étude et à la recherche linguistique par la collecte de témoignages, contes populaires, musiques traditionnelles, folklore, etc. réalisée dans les provinces françaises, puis de par le monde. Sillonnant les routes ou les pistes les plus reculées, les missions de collecte de Ferdinand Brunot dans les Ardennes en 1912, en Berry et Limousin en 1913 voient ainsi leurs enregistrements sonores systématiquement versés dans ce premier fonds.

Les Archives de la Parole s'attachaient également à enregistrer dans leurs studios des voix célèbres, à une époque où la radio n'existait pas encore : c'est grâce à elles que sont parvenues jusqu'à nous les voix d'Apollinaire, Verhaeren, Cécile Sorel, Colette, Paul Deschanel, Freud, du capitaine Dreyfus, de Valéry et de tant d'autres.

En 1925 la loi étend le dépôt légal au son et à l'image animée. Faute de texte d'application, cette disposition n'entre pas immédiatement en vigueur. En 1927, le Musée de la Parole et du Geste, succédant aux Archives de la Parole, est installé rue des Bernardins avec l'Institut de phonétique. À la même époque l'enregistrement électrique donne une impulsion nouvelle aux missions de collecte sur le terrain.

A partir de 1932, le nouveau directeur, Roger Dévigne, se préoccupe d'accroître son atlas sonore par des missions, enregistrements de studios et échanges. Les crédits limités orientent la collecte vers des enregistrements sur place avec musiciens et chanteurs de passage à Paris. Il obtient la création d'un laboratoire du son et d'un studio d'enregistrement doté d'appareils électriques portatifs : ce studio permet la duplication de disques édités par le Musée de la parole et l'accroissement des collections de folklore français et international sur disques souples Pyral. La collection comprend alors des danses d'Auvergne, des chants bretons, des traditions orales de Lorraine ou du pays basque, etc. Le studio d'enregistrement permet l'impression des disques rapportés de missions et duplication de disques prêtés.

2.2. Documents inédits et documents édités

L'essor des phonogrammes va croissant et en 1938 naît la Phonothèque nationale. Elle poursuit la politique de collecte du musée de la Parole et la systématise avec la publication, en 1943, du décret d'application sur le dépôt légal des phonogrammes. Le directeur Dévigne, dans le but de « réaliser par la phonographie un atlas sonore des parlers, patois, traditions populaires et vieux chants de France », organise des missions dans les provinces françaises : Hautes Alpes provençales et pays niçois en 1939, Languedoc, Rouergue, Bigorre, Couserans et Vallespir de 1941 à 1942, Normandie et Marais vendéen (chants de noces de veillées de travail) en 1946.

En France, sont couvertes les régions suivantes : Hautes Alpes, Ardennes, Ariège, Auvergne, Berry, Bretagne, Charente, Corse, Flandre, Foix, Gascogne, Ile-de-France, Limousin, Lorraine, Normandie, Orléanais, Périgord, Picardie, Poitou, Provence, Hautes et Basses Pyrénées, Rouergue, Roussillon, Vallespir, Vendée. Ces collections s'enrichissent ultérieurement : fonds Quilici de musique corse de tradition orale, etc. ...

Geneviève Massignon a déposé ses collectes en 1946 et 1961. Les documents (bandes magnétiques, photographies, carnets de route, manuscrits, questionnaires, etc.) concernent essentiellement le Canada et la France. En France, elle a réalisé des collectes dans l'Ouest, entre la Loire et la Gironde, qui devait servir à la constitution de l'Atlas linguistique et ethnographique de l'Ouest, des collectes de folklore sur les contes et les chansons populaires dans ces mêmes territoires et en Bretagne, ainsi qu'en Corse.

Pour des enregistrements inédits originaux, la Phonothèque nationale aide le collecteur en lui prêtant du matériel. En contrepartie le chercheur verse ses enregistrements qui sont copiés et conservés en archives de sécurité. Lorsqu'il effectue le dépôt, le chercheur autorise ou non la communication ; s'il la diffère pour pouvoir exploiter ces recherches, cas le plus fréquent, il indique la date à partir de laquelle le public pourra le consulter. Le but est d'assurer la conservation d'un patrimoine oral. A ce titre, est signé en 1976 une convention avec le CNRS (Département de linguistique et musicologie) qui permet à ses chercheurs en linguistique et musicologie de verser régulièrement des bandes sonores dans ce fonds d'archives. Ces collectes à caractère ethnographique, ethnomusicologique et linguistique se présentent sous forme d'entretiens et de chansons. Le collecteur a trié et réalisé le montage des documents qu'il verse et qui documente le versement. La France métropolitaine est particulièrement bien représentée dans ce fonds avec les départements de l'Ain, l'Aisne, le Bas-Rhin, le Calvados, les Côtes d'Armor, la Creuse, les Deux-Sèvres, l'Essonne, l'Eure, l'Eure-et-Loir, le Finistère, le Gard, la Haute-Garonne, les Hautes-Alpes, le Haut-Rhin, la Haute-Vienne, les Hauts-de-Seine, l'Hérault, l'Indre-et-Loire, l'Isère, le Lot-et-Garonne, la Manche, la Mayenne, la Moselle, le Nord, l'Oise, l'Orne, le Rhône, la Sarthe, la Seine, la Seine Maritime, la Seine-Saint-Denis, la Somme, le Tarn-et-Garonne, le Val-de-Marne, le Val-d'Oise, la Vienne et de la Vendée.

C'est ainsi qu'autour de la Phonothèque nationale se constituent les collections patrimoniales que les chercheurs peuvent consulter. Le dépôt légal permet ainsi la conservation de disques, édités, d'ethnologie et de folklore. On peut citer les labels Ocora, Unesco (Baerenreiter-musicaphon, Philips, Auvidis), Musée de l'Homme, Musiques du monde, BAM ou Chant du monde.

Rattachée à la Bibliothèque nationale en 1977, la Phonothèque reçoit depuis 1975 le dépôt légal des vidéogrammes et des documents multimédias et, signe des temps et de l'évolution des techniques, devient «département de la Phonothèque et de l'audiovisuel» puis, à la création de la Bibliothèque nationale de France en 1994, «département de l'Audiovisuel.

2.3. Une politique de mise à disposition accrue au public

Le Département Audiovisuel a entrepris, à l'occasion de la réalisation du projet Tolbiac, de développer l'accès à ses collections, mais aussi à d'autres collections ignorées ou d'accès difficile, et de coopérer avec d'autres établissements afin de signaler leurs collections sonores. Ainsi, la collection patrimoniale héritée de la Phonothèque nationale s'est enrichie d'acquisitions portant pour l'essentiel sur des documents inédits jusqu'à présent peu accessibles. Ces acquisitions sont destinées au grand public ou bien aux chercheurs. L'offre audiovisuelle est constituée essentiellement de documents audiovisuels acquis et d'une sélection de documents patrimoniaux reproduits. Elle rassemble dans chaque domaine les œuvres faisant référence pour la connaissance d'une discipline ou d'un genre, accompagnés par une collection d'imprimés en libre accès, utile à leur compréhension. Un des axes forts dans la sélection de documents ainsi proposés au grand public est l' «observatoire de la France ». Des émissions de radio, comme l'émission «Le pays d'ici» diffusé par France Culture qui aborde à chaque émission une ville et sa région en utilisant beaucoup le témoignage oral pour faire sentir aux auditeurs la vie quotidienne, des émissions télévisées, films associatifs, films institutionnels ou éducatifs présentant des régions, des hommes, des témoignages dans les années 60/70 présente une forme construite de l'archive orale.

L'accès aux collections patrimoniales constituées depuis 1911 comme à celles constituées plus récemment se fait au moyen de divers outils. Pour ce qui est des documents inédits entrés dans l'institution dans la première moitié du siècle, le catalogue de la collection de la Phonothèque nationale établi par la Commission internationale des arts et traditions populaires et publié par l'Unesco en 1952 (série C « musique ethnographique et folklorique ») regroupe des disques de folklore, des enregistrements de folklore interprété et harmonisé, des chants et airs populaires exécutés par des artistes professionnels. Disques enregistrés par des missions savantes dans les pays d'origine, par des maisons de disques ou au studio de la phonothèque par des amateurs. Les collectes postérieures sont répertoriées dans des fichiers par informateurs (classement département, sous -classement : commune, nom), enquêtes (classement enquêteurs, sous-classement date, département) et enregistrements (classement géographique). Le récolement, l'inventaire et l'informatisation des anciens fichiers, chantiers lancés en 1994, permettent de disposer d'une connaissance précise des fonds signalés dans le catalogue général de la bibliothèque. L'édition cumulative de la Bibliographie nationale française - Documents sonores, audiovisuels et multimédias sur cédérom est produite à partir de la base bibliographique BN-OPALINE du département de l'audiovisuel. Elle comporte les notices des documents entrés par dépôt légal depuis 1983. La recherche peut s'effectuer par support ou sur tous les supports, sur les nouveautés ou sur l'ensemble de la base de données, selon 24 critères. Les notices sont rédigées selon les normes françaises et internationales et comportent une description précise des œuvres contenues dans le document, avec les accès correspondants. Les documents de traditions font l'objet d'un titre uniforme de type « Traditions. France ».

La Bibliothèque a entrepris également de donner plus de sens à ses collections en les mettant en rapport avec les collections conservées dans d'autres établissements. Une politique de constitution d'un réseau de bibliothèques et d'établissements (archives, chambres de commerce et d'industrie, instituts de recherche, etc.) français dont la Bibliothèque nationale de France serait le cœur, inscrite dès 1989 dans le projet Bibliothèque de France, s'est progressivement mis en place depuis 1994. Le Département de l'Audiovisuel, conscient des contraintes de traitement physique, documentaire et juridique qui s'attachent à la gestion de ce type de fonds, s'oriente vers un partenariat avec les différentes formations détentrices d'archives du patrimoine oral dans ce cadre coopératif. Dans le domaine des traditions orales, un projet de pôle associé est en cours de réalisation avec la FAMDT, qui prévoit notamment une expertise en manière de normalisation bibliographique de la part de la BNF et la mise à disposition de documents audiovisuels. Les fonds pris en compte sont pour DASTUM le patrimoine breton et plus particulièrement la chanson et le conte, pour le Conservatoire occitan des rats et traditions populaires le patrimoine occitan et plus particulièrement la chanson et la danse en Gascogne, dans le Béarn, le Languedoc occidental et le Lauragais, pour METIVE le patrimoine poitevin et saintongeais et plus particulièrement la chanson et le conte dans le Poitou, en Charente et en Vendée et pour la Maison méditerranéenne et des sciences de l'homme (médiathèque/phonothèque) : le patrimoine provençal dans le domaine de la musique et de la tradition orale. Au terme de la convention, les notices bibliographiques des documents sonores appartenant aux centres retenus et que la BNF aura aidé à traiter documentairement figureront dans le Catalogue Collectif de France. De plus, un échantillon de la production de ces centres sera mis en consultation dans l'enceinte de la BNF.

Aujourd'hui, le public français est pris d'un engouement certain pour ces documents. Les mouvements indépendantistes, la revitalisation, voire la réinvention, de cultures particulières, la reconnaissance de langues spécifiques, la résurgence des dénominations provinciales participent d'une construction d'identité culturelle régionale. Le patrimoine sonore est un témoignage très précieux de la pluralité culturelle d'une région, utilisé par les ethnologues, les linguistes et les historiens. Le pluriel (les régions, les pays, les langues, les paysages, les clochers, les coutumes, les costumes, les cuisines, etc.) est aujourd'hui déterminant dans les représentations de la France. La collecte et la préservation des traditions orales participent de ce double souci de garder un témoignage des passés et des présents de la mosaïque française. Ces collections sonores, qui capturent les traditions orales comme autant de paroles gelées, renvoient les acteurs institutionnels et associatifs à un questionnement sur la valeur et l'utilisation de ces sources : seront-elles réutilisables par les chercheurs futurs ? seront-elles le terreau d'un enracinement dans l'espace local ? Font-ils œuvre de gardien de musée ? de médiateur culturel ?

*    

Latest Revision: June 28, 1999 Copyright © 1995-2000
International Federation of Library Associations and Institutions
www.ifla.org